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Histoire à Genève

Lors de deux passages en Europe, dans les années 1960 et 1970, le chef spirituel de l’Eglise kimbanguiste (à l’époque, le fils de Simon Kimbangu) établit les premiers contacts avec des fidèles résidant en Suisse et les incite à créer une communauté. « Cherchez, leur dit-il, il y a beaucoup de kimbanguistes ici ». Un premier groupe se forme à Genève en 1988 autour de Claude Diakanua, un pasteur récemment diplômé de la Faculté de théologie de la ville. L’année suivante, ce groupe découvre l’existence d’une autre communauté, plus grande, formée par Fabrice Matuala et rassemblant des kimbanguistes de toute la Suisse. La réunion de ces deux entités conduit à la création formelle de l’Eglise kimbanguiste en Suisse en 1989. Le groupe fréquente le temple protestant du Petit-Saconnex jusqu’en 2001, date à laquelle leur contrat de location n’est pas renouvelé. Ils sont alors accueillis au Centre protestant du Lignon où ils se réunissent toujours aujourd’hui.

 Sources :

Fabrice Matuala, pasteur et Claude Diakanua, conseiller général (c’est-à-dire responsable suisse).

Lieu de culte

Le centre paroissial protestant du Lignon a été construit en 1970, en même temps que l’église catholique de l’épiphanie et à côté d’elle, pour offrir aux 10 000 nouveaux habitants de la « Cité du Lignon » les infrastructures nécessaires à leur vie spirituelle. Avec les écoles, les terrains de sport et de jeu, les deux lieux de culte sont décrits à l’époque par l’architecte en chef, Georges Addor, comme « l’équipement normal pour une cité de 10 000 habitants. »[1].

La Cité du Lignon est à Genève ce que la Cité radieuse de Le Corbusier est à Marseille : une œuvre architecturale tentant de répondre à la croissance démographique d’après-guerre par l’idée de « villages verticaux » dispensant toutes les commodités et où il fait bon vivre.  Dans une interview accordée à la RTS en 1966 Georges Addor déclarait : «  nous avons fait l’impossible pour que les gens vivent dans le meilleur des mondes possibles. »[2]. Pour ce faire, il fut choisi d’implanter sur la parcelle un bâtiment d’un seul tenant de 11 à 15 étages se déroulant sur une ligne brisée de plus d’un kilomètre (bâtiment complété par deux tours). Ce parti-pris permet un ensoleillement optimum de tous les appartements, l’absence de vis-à-vis et, pour tous, une vue sur la verdure du « jardin ensoleillé », le parc public aménagé en contre-bas. Autant de bénéfices impossibles à offrir aux habitants dans une implantation classique disposant des barres d’immeubles parallèles.


[1] Dans une interview télévisée de 1966 menée par Claude Martin : http://www.rts.ch/archives/tv/information/carrefour/3436856-architecte-du-lignon.html

[2] Id.

Activités

L’Eglise kimbanguiste en Suisse rassemble un centaine de personnes. Ceux-ci se réunissent les premiers et deuxièmes dimanches du mois à Genève, les autres dimanches à Lausanne. Une trentaine d’entre eux habite Genève, les autres viennent de Bienne, Fribourg, Neuchâtel, Berne, Martigny, Saint-Gall et Lausanne. La plupart sont originaires des deux Congo, d’Angola et de Côte d’Ivoire.

La vie de l’Eglise est rythmée par les activités cultuelles (cultes dominicaux, réunions de prières hebdomadaires, retraites mensuelles) et les activités des différents groupes de fidèles. Ainsi une troupe de théâtre se réunit pour jouer des scènes de l’histoire de l’Eglise et de l’histoire biblique. Un groupe appelé le « mouvement des surveillants », dont les membres sont habillés en costume militaire, est chargé de protéger l’assemblée pendant le culte. Leur présence a été instaurée en raison des persécutions subies par l’Eglise kimbanguiste au Congo pendant la période coloniale. La communauté compte encore un groupe de guitaristes, une fanfare, et une association de femmes très active dans les œuvres sociales de l’Eglise. Elles apportent leur soutien aux personnes précaires et gèrent l’école du dimanche.

L’Eglise kimbanguiste appartient au Conseil œcuménique des Eglises  depuis 1969. En Suisse, la communauté est membre du Rassemblement des Eglises et Communautés Chrétiennes de Genève (RECG) et de Témoigner ensemble à Genève, un mouvement qui réunit des communautés protestantes, pour la plupart, et qui a pour but de tisser des liens entre les Eglises genevoises issues des migrations.

L’Eglise Kimbanguiste

L’Eglise de Jésus-Christ sur la terre par son Envoyé Spécial Simon Kimbangu, ou Eglise kimbanguiste, est une Eglise chrétienne née au Congo Belge dans les années 1920. Elle se forma de façon spontanée autour de Simon Kimbangu, un Congolais de confession baptiste, qui en avril 1921 commença à rassembler autour de lui des foules enthousiasmées par sa réputation de guérir les malades et par ses prédications sur le retour du Christ et la libération des Africains. Il s’attira ainsi les foudres des autorités coloniales belges qui le condamnèrent à mort en octobre 1921, avant de commuer sa peine en prison à perpétuité sous l’influence de la Société missionnaire baptiste.

Il mourut après 30 ans de réclusion, en 1951, mais cinq mois d’activité suffirent pour former la plus grande des Eglises africaines indépendantes. Après son emprisonnement en effet, le mouvement continua de s’accroître de façon clandestine, malgré la répression menée par le gouvernement colonial qui emprisonna et déporta en masse tous ceux qui y adhéraient. Ce n’est qu’en 1959 que celui-ci reconnut officiellement le mouvement comme une Eglise.

L’Eglise kimbanguiste est aujourd’hui présente dans la plupart des pays d’Afrique, possède ses propres écoles, y compris une faculté de théologie, gère des hôpitaux, des dispensaires, des centres agricoles et des centres de formation professionnelle. N’Kamba, la ville où est né et enterré Simon Kimbangu en République démocratique du Congo, est un lieu de pèlerinage considéré par les fidèles de l’Eglise comme la nouvelle Jérusalem (renommée d’ailleurs Nkamba-Jérusalem).

La religiosité kimbanguiste

L’Eglise kimbanguiste est une Eglise indépendante qui ne se rattache à aucun courant chrétien. Comme les catholiques, les protestants et les orthodoxes, elle professe la croyance en la Trinité (l’idée que Dieu, le Père, s’est incarné en Jésus, le Fils, et se manifeste par le Saint-Esprit), l’amour de Dieu et de son prochain. Elle insiste sur le respect des commandements bibliques, la réalisation d’œuvres charitables et résume ces principes essentiels dans la devise : «BolingoMibekoMisala» (amour envers son prochain – obéissance aux lois divines – pratique des bonnes œuvres). Simon Kimbangu est considéré comme un envoyé de Jésus venu apporter l’Evangile aux Africains.

L’Eglise kimbanguiste se distingue des autres Eglises chrétiennes par la pratique de quatre sacrements : le baptême dès l’âge de 12 ans – par imposition des mains et non par l’eau-, la cène – célébrée seulement trois fois par année lors des fêtes importantes -, l’ordination et le mariage.

Au culte, hommes et femmes sont assis séparément. Tous se déchaussent car le lieu de prière est considéré comme un lieu saint où les femmes se couvrent également les cheveux. Les chants tiennent une grande place dans le culte, tout comme la fanfare et les processions à pas rythmés. Les fidèles s’y rendent vêtus de vert et blanc, les couleurs de l’Eglise, symboles d’espoir et de pureté.

Les kimbanguistes ont des heures destinées à la prière (minuit, 3h, 10h, 12h, 15h, 18h et 22h), heures auxquelles le croyant est invité à se recueillir quelques instants s’il le peut. Elles sont comprises comme les heures de prières d’Israël dans la Bible.

Les fêtes de l’Eglise font coïncider les grands moments de son histoire avec les grandes dates chrétiennes. Le 6 avril commémore Pâques en même temps que la fondation de l’Eglise kimbanguiste. Cette date correspond au jour où Simon Kimbangu a commencé son ministère par la guérison d’une femme. La nativité (Noël) est fêtée le 25 mai du fait d’une interprétation de l’Evangile déduisant que  l’annonciation* a été faite au mois de septembre.  Le jour exact de la naissance est considéré comme impossible à connaître, le 25 a été choisi car il est le jour de la naissance du deuxième fils de Simon Kimbangu. Les autres fêtes célèbrent la mort de Simon Kimbangu (le 12 octobre), la reconnaissance de l’Eglise par les autorités coloniales belges (le 24 décembre) et la mort du premier chef spirituel (le 8 juillet).

Le code moral de l’Eglise implique pour ses membres de s’abstenir de toute violence (« ne pas rendre le mal par le mal »), mais aussi de drogues, d’alcool, de tabac, et de viande de porc, l’animal étant perçu comme le refuge des esprits impurs chassés par Jésus. Il leur est interdit de recourir à la magie, de commettre un adultère et d’être polygames.

Indications bibliographiques :

Sources académiques :

GISEL, Pierre (dir.), Encyclopédie du protestantisme, Quadrige, PUF, Labor et Fides, 2006 (1ère éd. 1995).

LIVINGSTONE, E. A. (ed.), The Concise Oxford Dictionary of the Christian Church, Oxford University Press, 2006 (version online 2013).

MOKOKO GAMPIOT Aurélien, Les kimbanguistes en France, expression messianique d’une église afro chrétienne en contexte migratoire, L’Harmattan 2010.

MOKOKO GAMPIOT, Aurélien, Kimbanguisme et identité noire, L’Harmattan, 2004.

PATTE, Daniel (éd.), The Cambridge dictionary of Christianity, Cambridge University Press, 2010.

SINDA, Martial, Le messianisme congolais et ses incidences politiques : kimbanguisme, matsouanisme, autres mouvements, Précédé par « Les Christ noirs » de Roger Bastide, Payot, 1972.

Sources kimbanguistes :

KUNTIMA DIANGIENDA, Joseph, L’histoire du kimbanguisme, Editions kimbanguistes, 1984.