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Histoire à Genève

Habad Genève est un centre communautaire juif qui se rattache au mouvement international Habad Loubavitch, dont le siège est à New York. A Genève, le centre a été créé en 1989 dans le but de développer et animer la vie culturelle juive dans la cité. A cette date, il s’installe dans un petit local de la rue Maunoir, aux Eaux-Vives, et commence à organiser des cours, des conférences et des activités autour des grands moments du calendrier juif. Des fidèles aimant l’esprit et le message du lieu se montrent intéressés par l’ouverture d’une salle de prière, ce qui conduit le centre à déménager dans un espace un peu plus grand à la rue de lac. En 2002, Habad Genève rachète les anciens locaux administratifs de l’entreprise d’ascenseurs Schindler. Il y installe une synagogue, un mikve* et ouvre une école au deuxième étage du bâtiment. Le centre communautaire accueille aujourd’hui 150 à 200 personnes aux offices de shabbat et en rassemble plusieurs centaines aux grandes fêtes (chiffres communiqués par le rabbin du centre).

Sources :

Mendel Pevzner, rabbin et fondateur du centre communautaire Habad Genève.

Lieu de culte

La synagogue de Habad Genève a été aménagée au rez-de-chaussée des anciens bureaux de l’entreprise Schindler dont le centre a racheté le bâtiment en 2002. Elle comporte un vaste hall d’entrée placé sous le regard bienveillant du rebbe (« guide ») Menahem Mendel Schneerson (1902-1994), sixième et dernier rebbe du mouvement Habad. De grandes bibliothèques accompagnent le fidèle jusqu’à l’entrée dans la salle de culte, où une cloison de verre partiellement transparente matérialise la séparation entre hommes et femmes, traditionnelle dans les synagogues (les synagogues des communautés réformées et libérales font exception). L’« arche sainte », qui contient les rouleaux de la Torah, porte en son sommet cette phrase, en hébreu, extraite du livre d’Isaïe (Is 2, 3) : « car c’est de Sion que sort la doctrine et de Jérusalem la parole du Seigneur ». Le passage duquel elle est tirée[1] est interprété comme une annonce de la venue du Messie, perçue comme imminente par le mouvement Habad.

A droite et à gauche de l’arche, les dix premières lettres de l’alphabet hébreu représentent les dix commandements.

 

[1] « Il arrivera, à la fin des temps, que la montagne de la maison du Seigneur sera affermie sur la cime des montagnes et se dressera au-dessus des collines, et toutes les nations y afflueront. Et nombre de peuples iront en disant: « Or çà, gravissons la montagne de l’Eternel pour gagner la maison du Dieu de Jacob, afin qu’il nous enseigne ses voies et que nous puissions suivre ses sentiers, car c’est de Sion que sort la doctrine et de Jérusalem la parole du Seigneur. » Il sera un arbitre entre les nations et le précepteur de peuples nombreux; ceux-ci alors de leurs glaives forgeront des socs de charrue et de leurs lances des serpettes; un peuple ne tirera plus l’épée contre un autre peuple, et on n’apprendra plus l’art des combats.» Isaïe 2, 1-4, Bible du Rabbinat, traduction de Jacques Kohn.

 

Activités

 

Outre les services religieux à la synagogue (prières trois fois par jour et offices de shabat), le centre Habad Genève propose des cours de Torah et des enseignements religieux pour enfants et adultes. Dans sa volonté d’unifier les juifs de différents courants, il organise également des conférences, concerts et autres manifestations autour des grandes dates du calendrier juif. Il existe au sein du Centre Habad de Genève un « club » de femmes qui organise des soirées féminines chaque mois. L’été, le centre communautaire accueille les enfants au sein d’un centre aéré.

 

Le mouvement Habad et le hassidisme

Le mouvement Habad apparaît à la fin du 18e siècle dans la région de l’actuelle Biélorussie et se développe dans le sillage du rabbin Shnéour Zalman de Lyadi (1745-1812). Ce dernier est un disciple indirect de Israël Ben Eliezer (±1700-1760), le fondateur du hassidisme, principal courant juif mystique à l’époque moderne.

C’est dans une Pologne éclatée, ravagée par les guerres, les invasions et les révoltes que naît Israël Ben Eliezer au début du 18e siècle. Dans les années 1730, il se fait connaître pour sa piété et sa réputation d’accomplir des miracles et prend le nom de Baal Shem Tov (« le maître du bon nom », c’est-à-dire le maître du nom divin, qualificatif donné à ceux qui connaissaient le nom caché de Dieu). Il valorise la prière comme moyen de se rapprocher de Dieu, encourage une foi vivante, fervente et confiante, plus que l’étude de la Bible et de la littérature rabbinique. Ce discours enthousiasme les juifs polonais en proie à la misère et aux persécutions. La voie qu’il prône est ouverte à tous, même aux moins instruits. Elle promeut une approche plus spontanée de la religion et la recherche de Dieu dans la joie, quête guidée par un tsaddik (« juste ») ou un rebbe (« guide ») qui fait le lien entre le fidèle et Dieu. Les enseignements de Baal Shem Tov ont un fort accent kabbalistique qui sera développé après sa mort par ses disciples, notamment Dov Baer, le Maggid.

Le mouvement se structure rapidement et prend le nom de hassidisme (de hassid, « pieux »). Des communautés dirigées par un tsadik (ou rebbe) se forment et développent leurs caractéristiques propres. Dans certaines, la prière est portée par le chant, le balancement rythmique ou la dance, perçus comme des vecteurs conduisant à l’extase. La fonction de tsadik (ou rebbe) devient peu à peu héréditaire et concourt à la formation de communautés indépendantes, décrites comme des dynasties. C’est ainsi que naît le mouvement Habab, aussi appelé Loubavitch, d’après le nom de la ville biélorusse où vécurent ses premiers dirigeants.

Habad est un acronyme formé à partir des initiales de trois mots hébreux : Hokhma – la sagesse-, Bina – l’intelligence- et Daat – la connaissance. Ceux-ci correspondent aux trois sphères supérieures (sefirot supérieures) définies par la Kabbale comme émanant de Dieu. Dans cette logique, la sagesse est le creuset de l’élaboration des idées, l’intelligence permet leur analyse, la connaissance, la maîtrise des idées et la vision de la réalité divine derrière le voile qui nous en sépare. Ainsi le mouvement Habad remet l’étude des textes religieux au centre de la quête du divin.

Sept rabbi (nom donné aux rebbe de la dynastie Habad) se sont succédés jusqu’à aujourd’hui.  Le septième, Menahem Mendel Schneerson (1902-1994), aussi appelé le Rabbi de Loubavitch, n’a pas eu de successeur. Exilé aux Etats-Unis durant Seconde Guerre mondiale, il a donné au mouvement une impulsion décisive en établissant une politique de diffusion des idées Habad dans tous les milieux juifs, ouvrant des écoles, des orphelinats, distribuant des écrits, et promouvant les groupes d’études et l’observance des fêtes religieuses. L’organisation est aujourd’hui présente dans environ 80 pays, sur tous les continents, et plus particulièrement aux Etats-Unis, en Israël et en Europe. En Suisse, il existe des centres Habad à Bâle, Genève, Lugano, Lucerne, Zug et Zurich.

La religiosité des habadnik

Les fondements de la pensée Habad sont exposés dans les écrits du fondateur de la dynastie, Shnéour Zalman de Lyadi et rejoignent ceux du hassidisme : contemplation du divin dans tous les aspects de la réalité du monde (« Il n’y a pas d’endroit où Il n’est pas »), communion constante avec Dieu (« tout acte est religieux »), intensité de l’émotion dans la pratique religieuse, place importante accordée à la dévotion et à la méditation.

Le mouvement Habad se caractérise par l’accent mis sur l’effort intellectuel dans la quête religieuse comme en témoigne son nom. Cet effort passe notamment par l’étude de la Torah écrite et orale.

Les habadnik, ou Loubavitch, se distinguent également par la croyance en la venue imminente du Messie, réaffirmée fortement par le dernier rebbe, Menahem Mendel Schneerson. Celle-ci influence à la fois la théologie, l’organisation et les activités du mouvement : des événements mondiaux interprétés à la lumière de cette attente, aux efforts prosélytes envers les juifs peu/non pratiquants ou non orthodoxes, en passant par l’existence d’« émissaires » chargés d’implanter de nouveaux centres dans le monde, toutes ces activités ont pour but de hâter la venue du Messie. A la différence d’autres courants hassidiques, le mouvement Habad ne voit pas dans la modernité une menace pour le judaïsme et cherche à développer des relations avec les sociétés dans lesquelles il évolue ; ce qui est aussi un moyen de renforcer l’effort prosélyte ainsi que de diffuser la pensée Habad.

Comme tous les juifs pratiquants, les habadnik respectent un certain nombre de rites et de traditions considérés comme essentiels : la circoncision, symbole de l’alliance établie par Dieu avec le peuple juif (elle est un rite majeur, pratiqué huit jours après la naissance d’un garçon, également observé par les juifs libéraux ou réformés), le respect du shabbat (jour de repos le samedi), la célébration des fêtes du calendrier religieux, les interdits alimentaires ou encore la bar ou bat-mitzvah.

Indications bibliographiques :

BAUER, Julien, Les juifs hassidiques, PUF, Que-sais-je ?, 1994.

JACOBS, Louis (ed.), A Concise Companion to Jewish Religion, Oxford University Press, 1999 (version online 2003).

KRIEF, Hervé, Les grands courants de la spiritualité juive, Peter Lang, 2008.

NEUSNER, Jacob, AVERY-PECK, Alan J., GREEN, William Scott (ed.), The encyclopaedia of Judaism, Brill, 2000-2004.

NISENBAUM, Haïm, Qu’est-ce que le hassidisme, Edition du Seuil, 1997.

PODSELVER, Laurence, Retour au judaïsme ? Les Loubavitch en France, Odile Jacob, 2010^.

SKOLNIK, Fred, BERENBAUM, Michael (ed.), Encyclopaedia Judaica, Macmillan Reference USA in association with the Keter Pub. House, 2007 (2nd ed.).

WIGODER, Geoffrey, Dictionnaire encyclopédique du judaïsme, Cerf/Robert Laffont, 1996.

Dictionnaire du judaïsme, Encyclopaedia Universalis : Albin Michel, 1998.